Le Forum Génération Égalité, qui s’est tenu du 30 juin au 02 juillet, a réuni des milliers de personnes issues d’horizons variés, dans le but de faire progresser l’égalité entre les hommes et les femmes. L’occasion rêvée pour Macron de revendiquer être un fervent “féministe”… Entre discours politique et réalité, qu’en est-il des revendications concrètes dans la bataille pour l’égalité ?
La pandémie a entraîné un retard de 36 ans en matière d’égalité des droits entre hommes et femmes, sur tous les plans, selon le Forum économique de Davos. Cette égalité n’est acquise dans aucun pays au monde. C’est pour tenter de répondre à ce défi qu’était organisé le Forum Génération Égalité, sous l’égide de l’ONU.
Commencé en mars au Mexique, cet événement mondial – le premier consacré aux femmes depuis celui de Pékin organisé en 1995 – s’achève aujourd’hui à Paris. Mais si en 1995, 189 États s’étaient réunis dans la capitale chinoise, ils n’étaient que 68 à participer au Forum de Paris. Et pour cause, chaque personne qui représentait un État devait présenter un engagement sur l’une de ces six thématiques : la violence basée sur le genre, l’égalité économique, le droit à disposer de son corps, l’action féministe pour la justice climatique, les technologies et innovations au service de l’égalité et les mouvements et leaderships féministes. Une condition sinequanone faisant office de ticket d’entrée, chaque État devant présenter un engagement concret. Un moyen pour cet événement d’éviter les paroles en l’air, malheureusement bien plus fréquentes que les actions concrètes.
Outre des personnalités connues comme Hillary Clinton, Kamala Harris ou Angela Merkel, le forum a rassemblé des activistes, représentants d’ONG et d’associations, mais aussi des membres de la société civile et des représentants d’entreprises. Parmi eux, un certain Emmanuel Macron, qui aime se présenter comme un leader de la lutte pour l’égalité.
Macron, un féministe en carton ?
Il fallait s’y attendre : Macron s’est évidemment saisi de cette occasion pour se présenter comme un leader de la lutte pour les droits des femmes, allant même jusqu’à se revendiquer comme “féministe”. Il avait d’ailleurs annoncé la lutte pour l’égalité comme grande cause du quinquennat. Une affirmation qui pose question, venant d’un Président dont le ministre de l’Intérieur est accusé de viol, mais qui a bénéficié d’un soutien présidentiel sans faille : face à la polémique, Macron avait affirmé entretenir une relation « de confiance d’homme à homme » avec Darmanin.
Un “féministe” donc, qui entrave pourtant le droit des femmes à disposer de leur corps comme elles le souhaitent, se disant opposé à l’allongement en France du délai de recours à l’IVG de 12 à 14 semaines dans son interview pour le magazine Elle. Qui, interrogé sur les crop-top, a prôné “les tenues décentes” à l’école, alors même que ce débat, lunaire, revient à hypersexualiser les jeunes filles.
Si Macron prétend tout faire pour lutter contre les féminicides, il aura pourtant fallu d’importantes mobilisations pour que soit organisé le Grenelle des violences conjugales de 2019. Et alors que les associations réclamaient un budget d’un milliard d’euros pour lutter contre les féminicides, il n’a été que de 79 millions d’euros en 2019. Pire encore, celui alloué à l’égalité hommes / femmes a baissé entre 2019 et 2020.
On se souvient aussi de la tentative du gouvernement de privatiser le 3919, le numéro d’aide aux femmes victimes de violences, géré par un collectif d’associations, le réseau Solidarité Femmes. La tentative d’ouvrir cette ligne à la concurrence avait profondément choqué, car ces appels nécessitent une écoute particulière ainsi que l’expérience des associations qui en avaient la responsabilité. En aucun cas la détresse ne doit devenir une source de profits pour des entreprises privées.
Enfin, rappelons nous qu’il y a un an, la France a tout fait pour bloquer le vote sur une directive européenne instaurant un congé parental, avec l’argument qu’on leur connaît bien : son coût “potentiellement exorbitant”. Une loi qui allait pourtant clairement dans le sens de l’égalité hommes femmes.
Macron aura donc beau se présenter comme un grand défenseur des droits des femmes, il semble y avoir un certain décalage entre les beaux discours qu’il tient à longueur de temps et la politique qu’il mène depuis 4 ans.
Lutter pour l’égalité, c’est possible, notamment à l’échelle européenne
La lutte pour l’égalité hommes / femmes est un travail qui doit être mené à tous les échelons. Au sein de l’Union européenne, de graves violations des droits des femmes ont lieu, notamment en Pologne où le gouvernement a de facto interdit l’IVG. Pour lutter contre ce recul, et encourager des avancées pour les droits des femmes, un rapport ambitieux sur les droits génésiques et sexuels a été voté le 24 juin au Parlement européen.
Un rapport que nous avons largement défendu, malgré les multiples tentatives de la droite de le saccager et le lobbying intensif des organisations réactionnaires. Chaque femme doit pouvoir diposer de son corps comme elle le souhaite, un mantra que nous avons aussi exprimé le 23 juin lors d’un rassemblement devant le Parlement européen.
Comme les associations, nous demandons, entre autres, la gratuité des protections périodiques, pour lutter contre la précarité menstruelle, qui touche 2 millions de femmes rien qu’en France. Leïla Chaibi est d’ailleurs intervenue sur cette question il y a peu, brandissant tampons et serviettes dans l’hémicycle et demandant de “changer les règles” par suppression de la TVA partout en Europe sur les protections périodiques et en facilitant leur accès via des distributeurs. Des revendications qui, mises bout à bout, changent le quotidien des femmes.
Les luttes pour l’égalité des genres, le respect et la protection des femmes ne peuvent se contenter de mesurettes. Au vu du nombre de féminicides recensé, d’agressions, et d’attaques perpétuelles et violentes contre les droits, ce combat doit être central, et mené avec détermination. À ces attentes et besoins qui pressent, pas de miracle. C’est par des financements massifs et une volonté politique, qui pour l’instant semble encore loin d’être acquise, que nous pourrons instaurer des sociétés où les femmes n’ont plus à craindre pour leurs droits, et leur sécurité. Alors vite, un peu de courage politique !