Aujourd’hui, la commission des Affaires constitutionnelles du Parlement européen votait le rapport “renforcement de la transparence et de l’intégrité des institutions de l’Union par la création d’un organisme européen indépendant chargé des questions d’éthique”. Les députés européens ont entériné leur position sur ce que devrait être une future “haute autorité de la vie publique” au niveau européen. Une position loin d’être à la hauteur des enjeux.
La nécessité d’une autorité forte et indépendante
Ces dernières années, de multiples cas de comportement contraire à l’éthique au sein des institutions européennes ont révélé d’importantes lacunes systémiques. Les cas de portes tournantes d’anciens membres de la Commission tels que José Manuel Barroso et Neelie Kroes, d’eurodéputés tels que Sharon Bowles et Holger Krahmer, ou de membres du personnel tels qu’Adam Farkas et Aura Salla, rappellent que le système actuel de surveillance de l’éthique de l’UE est loin de réduire au minimum le risque de comportement non éthique.
Dès le début des négociations, j’avais fait entendre une position claire et ambitieuse. Je me suis engagée pour un organisme d’éthique véritablement indépendant, capable d’initier des enquêtes de sa propre initiative et de prononcer des sanctions. Le choix de l’éthique. Renew et le PPE, eux, ont fait le choix du pathétique.
Un texte affaibli par Renew et le PPE
L’occasion était belle, mais sous pression de la droite et des libéraux, le Parlement européen rate le coche de pouvoir enfin s’attaquer au lobbying de couloir, aux conflits d’intérêts, aux portes tournantes, au pantouflage.
La droite a fait de l’obstruction du début jusqu’à la fin, n’hésitant pas à repousser le vote, initialement prévu en juin. De son côté, La République en Marche a cherché à se donner le beau rôle en se posant comme messie du compromis. Résultat : le PPE ne soutient toujours pas le texte, évidemment, et au passage, le rapport a été sensiblement vidé de sa substance.
Comment ? Les comités éthiques existants, propres à chaque institution, continuent d’exister. L’objectif même d’un Organisme éthique unique, commun aux institutions et qui puisse édicter des règles éthiques communes, est donc caduque. Autre décision qui affaiblit profondément le rapport : au lieu de pouvoir “prononcer des sanctions”, l’Organisme éthique ne pourra que “recommander des sanctions”. Des recommandations qui pourront donc tomber aux oubliettes de la bureaucratie européenne. Comment penser que les conflits d’intérêts vont cesser quand, malgré une trentaine de cas ne serait-ce qu’au Parlement, aucune sanction n’a jamais été prise à ce jour ?
Notre rapport devait lancer un message politique clair à la Commission, en amont de sa proposition législative. Face au manque d’ambition de notre institution, la Commission aura toute liberté pour proposer un texte encore plus faible.
Si j’ai malgré tout décidé de voter en faveur de ce texte, c’est pour montrer mon soutien à toute initiative liée à l’ajout d’éthique au sein de l’Union européenne car celle-ci en a grand besoin. Cependant, je ne peux que regretter un résultat si faible, dicté par certains au détriment de la majorité et du bien commun.
Leïla Chaibi, députée européenne France insoumise