Hold-up des lobbys sur la sécurité alimentaire mondiale

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Aujourd’hui a lieu le sommet sur les systèmes alimentaires mondiaux, organisé par l’ONU en étroit partenariat avec le Forum économique mondial. Ce qui pourrait être une occasion de rebattre les cartes d’un fonctionnement qui ne permet pas de répondre aux besoins alimentaires de la planète, est en réalité un événement largement piloté par les multinationales de l’agro-industrie. En 1996 déjà, les Etats membres de l’ONU s’étaient engagés à éradiquer la faim de la surface du globe d’ici dix ans. 25 ans plus tard, force est de constater que cet objectif est loin d’être atteint. Alors que la faim et la malnutrition touchent 2 milliards d’êtres humains, il est grand temps de proposer un autre modèle !

Un sommet détourné par les multinationales

La persistance de l’insécurité alimentaire est due à plusieurs facteurs : une mauvaise répartition des richesses à l’échelle des Etats et du monde, le développement d’accords de libre-échange détruisant les économies vivrières des régions du sud au profit des pays les plus riches, mais aussi la destruction des écosystèmes, notamment par l’industrie et l’agriculture intensive. Malgré les nombreuses alertes lancées par les Etats du sud, les ONG et les organisations internationales, le même schéma continue de s’étendre : la prédation des ressources et l’industrialisation des productions agricoles au bénéfice d’une poignée d’actionnaires. 

Le sommet qui se tient actuellement n’est pas en reste: organisé par l’ONU, il a été organisé dans le cadre d’un étroit partenariat avec le Forum économique mondial de Davos. Faisant la part belle au secteur privé, les multinationales de l’agroalimentaire mènent la barque d’un sommet qui veut définir les orientations mondiales en matière de sécurité alimentaire pour les années à venir. Emmanuel Maurel lance également l’alerte :

La FAO a pourtant rappelé que de très nombreuses recherches ont montré le rôle essentiel de l’agroécologie paysanne pour faire face aux défis sociaux, alimentaires et environnementaux. Mais parmi les organisateurs du sommet, nombreux sont ceux qui préfèrent promouvoir une agriculture “technologique” autour de solutions prétendument révolutionnaires et faussement vertes. L’Afrique et l’Asie nous montrent pourtant  un autre chemin. Sur ces continents, ce sont les petits paysans qui produisent 80% des aliments qui y sont consommés. Les techniques utilisées nécessitent bien moins de ressources, font état d’un rendement énergétique bien supérieur et surtout ont une capacité à restaurer les écosystèmes, quand la monoculture et les intrants chimiques promus par les multinationales anéantissent au contraire toute capacité des populations à subsister à leurs besoins sur le long terme.

Un PAC à rebours des besoins alimentaires européens

Les entreprises de prédation de l’agro industrie sur la paysannerie et les cultures vivrières ne sont pas seulement l’apanage des pays les plus pauvres. Au sein de l’Union Européenne, la nouvelle PAC qui s’apprête à être votée par le Parlement européen maintient artificiellement en vie ce système destructeur. Préférant comme toujours financer l’agriculture industrielle plutôt que l’agroécologie, respectueuse des écosystèmes et socialement juste, la Politique Agricole Commune nous emmène droit dans le mur. Nos agriculteurs ne parviennent pas à vivre dignement de leur travail, les citoyens européens ne parviennent pas à s’alimenter de façon nutritive et durable et nos écosystèmes sont toujours plus endommagés. A l’échelle du monde, la production a augmenté de 300% depuis le milieu des années 60. Pourtant 60% des populations souffrant de la faim sont issues du monde agricole. Le problème n’est donc pas tant celui de favoriser une augmentation de la production, sinon celui de la répartition des richesses et de la durabilité de notre modèle agricole.

Le greenwashing, la réponse des élites à la crise écologique

L’écologie à la sauce libérale n’est qu’une illusion, un moyen pour le système capitaliste de continuer à exister sans remettre ses fondamentaux en cause, alors que ceux-là mêmes sont responsables de l’effondrement climatique : accords de libre-échange, agriculture industrielle, pollution industrielle, surpêche, consommation excessive de viande, autant de voies dangereuses qui fragilisent depuis des dizaines d’années nos écosystèmes, tout en favorisant de profondes inégalités sociales partout sur la planète. 

Loin de remettre en question ce modèle, les leaders mondiaux font tout leur possible pour continuer dans la même direction et ignorent sans sourciller les milliers de scientifiques et d’experts qui alertent depuis de nombreuses années sur la situation. Les populations quant à elles subissent de plein fouet les résultats catastrophiques qui découlent de l’égoïsme de l’oligarchie. Cette dernière est prête à tout pour empêcher tout réel changement de fonctionnement, qui viendrait remettre en cause ses privilèges. 

Défendons une sécurité alimentaire mondiale en harmonie avec la nature

Notre délégation soutient un changement de système radical qui s’appuie sur la bifurcation écologique et la planification. Sur le plan européen, il est urgent de revoir en profondeur la PAC, qui pourrait être un véritable outil de transformation de notre système agricole, et donc alimentaire : aidons les travailleurs de la terre à mettre en place une agriculture fondée sur le respect de l’environnement et le bien-être animal. Il faut favoriser l’agriculture bio, locale, plus végétale et miser sur l’agroécologie paysanne qui est capable de répondre aux défis sociaux, alimentaires et environnementaux contemporains. Mettons un coup d’arrêt au système agro-alimentaire et résistons aux pressions des multinationales qui font tout pour protéger leurs profits !

Nous devons aussi mettre un terme à la destruction massive de nos mers et océans qui subissent de plein fouet une pêche industrielle mortifère tout en réduisant à néant les petits pêcheurs artisanaux. La Politique Commune de la Pêche a été entièrement manipulée par les lobbyistes et industriels, qui ont permis aux grands groupes polluants de continuer à toucher des financements astronomiques, là où les pêcheurs artisanaux n’ont eu que des miettes. 

Une agriculture et une pêche en accord avec l’environnement sont nécessaires. Nous avons les moyens humains et technologiques pour faire évoluer notre modèle et modifier nos habitudes, seul un évident manque de courage et de volonté politique bloque cette bifurcation. 

Le constat est sans appel. 2 milliards de personnes à travers le monde souffrent de malnutrition. Alors que l’insécurité alimentaire atteint un seuil critique, les choix politiques au niveau international sont décisifs. Transformer notre système alimentaire est crucial pour résoudre la crise à la fois sociale et écologique : un autre modèle est possible et il faut agir maintenant.

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