Face à l’urgence écologique, nous devons apporter des réponses rapides, ambitieuses, et durables pour atteindre nos objectifs climatiques d’ici à 2030 et à 2050. L’un des grands chantiers prioritaires est celui de l’augmentation et de la décarbonisation de la production d’électricité, dont la part dans les émissions de gaz à effet de serre est conséquente. Si dans cette course contre la montre, l’Union européenne pourrait organiser la planification de cette mutation, elle se contente d’être un guichet administratif auprès d’un secteur privé qui agit par intérêt et pour le profit.
Planifier, redonner du pouvoir à la puissance publique
Aujourd’hui, le Parlement européen a voté sur un rapport d’initiative pour la stratégie de déploiement des énergies marines renouvelables, nécessaires pour atteindre nos objectifs climatiques. Les énergies marines renouvelables (EMR) se composent de l’éolien offshore (flottant ou posé), de l’hydrolien, de l’énergie marémotrice, de l’énergie osmotique, de l’énergie thermique et des SWAC. À l’heure actuelle, seul l’éolien posé a atteint une maturité technologique permettant son large déploiement. Si le rapport présenté est intéressant par l’ambition qu’il se fixe, par son approche durable en ce qui concerne le cycle de vie des technologies, c’est-à-dire sur la conception circulaire des matériaux, il manque d’ambition en matière de planification, notamment spatiale, et de protection de la biodiversité. Il se contente d’une vision classique et libérale du rôle des pouvoirs publics, vu comme des facilitateurs d’initiatives privées. Pourtant, la puissance publique doit bel et bien jouer un rôle central dans la transition énergétique. Le déploiement massif des EMR est essentiel pour décarboner nos économies et c’est un secteur d’avenir qui permettra la création de milliers d’emplois. Cependant, la vision court termiste et ancrée dans la logique de marché ne permet pas d’instaurer une planification optimale du développement de l’énergie renouvelable.
Par exemple, un simple additionnement de parcs à ceux existant comme le défend la France n’est pas une solution. C’est ce que pointe le Conseil national de la protection de la nature, qui dénonce la politique de “poupée russe” (à savoir ajouter des parcs aux parcs), une stratégie qui risque d’entraîner des dégâts environnementaux importants. La question de la disposition spatiale est donc essentielle et nous ne pouvons nous contenter de signer quelques accords avec des entreprises privées et de jouer un rôle de facilitateur de projets. Au contraire, penser le développement du renouvelable par un travail global de spatialisation, basé sur les études d’impact menées localement sur chaque espace maritime concerné, serait un moyen d’augmenter les capacités tout en protégeant les écosystèmes. Il s’agit là d’un travail important que les Etats doivent mener en collaboration avec tous les acteurs concernés.
Flécher les investissements en faveur du renouvelable
Plus globalement, le renouvelable pâtit d’un manque évident d’investissement. La politique de l’Union européenne va même à l’encontre de ses propres objectifs climatiques ! La Commission a par exemple décidé il y a peu de mettre dans la liste des énergies vertes le gaz et le nucléaire pour satisfaire certains pays, une décision irresponsable donnant ainsi naissance au plus bel exemple de greenwashing institutionnel en Europe. Cet exemple montre que le nœud du problème réside dans la manière d’aborder la crise climatique. Actuellement, ce sont bel et bien les règles du marché qui prédominent les décisions politiques européennes, et donc les intérêts privés. Pourtant nombre d’acteurs environnementaux, membres d’association de protection de la nature, citoyens et politiques, réclament l’engagement d’investissements massifs dans les énergies renouvelables marines et terrestres de manière planifiée. Comme le dit Négawatt dans son scénario 2022, le trio de la sobriété, de l’efficacité et du renouvelable est un trio gagnant pour un avenir souhaitable et soutenable.
Mais pour le moment sur terre ou en mer, les énergies durables représentent aujourd’hui en Europe seulement 22.1% de notre consommation finale d’énergie sur le Vieux Continent. Le nouvel horizon que s’est fixé la Commission européenne est d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, en portant notamment à 40% la part des énergies renouvelables en Europe en 2030. Mais notre délégation le rappelle: sans investissement ni planification, il sera bien difficile de tenir ces engagements. Il est temps de passer à la vitesse supérieure dans l’objectif de décarboner nos sociétés !