DSA & DMA : les plateformes numériques comme les GAFAM ne doivent plus faire la loi !

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Les plateformes numériques s’introduisent chaque jour un peu plus dans nos modes de vie et dans notre vie privée. C’est particulièrement le cas des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) qui sont devenus des monopoles et sont omniprésents dans notre société. Afin de mieux protéger les utilisateurs et les professionnels quant aux méthodes sans foi ni loi des plateformes, deux grandes lois européennes sont en cours : le règlement sur les services numériques (ou Digital Service Act – DSA) et le règlement sur les marchés numériques (ou Digital Market Act – DMA). Ces deux règlements visent à protéger la liberté d’expression, protéger les consommateurs et leurs données personnelles… Si ces deux règlements représentent une avancée, la porte est encore laissée ouverte à des pratiques néfastes que nous nous battons pour éliminer. 

Ces dernières décennies, les plateformes numériques ont acquis une puissance énorme en s’imposant dans tous les aspects de notre vie : au travail, dans les études, dans les communications, les transports… La pandémie de Covid-19 a largement renforcé notre dépendance au numérique et a par la même occasion souligné la nécessité de mieux réguler ce secteur. Les plateformes ont acquis un tel pouvoir qu’elles sont désormais capables de censurer des contenus, d’influencer nos choix de consommation… Or nous ne pouvons nous permettre que le monopole des GAFAM leur donne un pouvoir démesuré sur nos vies et sur la liberté d’expression. Il faut donc agir contre leur monopole via la politique de concurrence et les contraindre à respecter un certain nombre de règles, notamment de transparence de leur algorithme, pour pouvoir assurer des droits aussi fondamentaux que la liberté d’expression. Ajoutons à cela que le numérique est un domaine dans lequel l’Union européenne manque cruellement de souveraineté vis-à-vis des USA et Chine, d’où la nécessité de mieux réguler. 

Le Parlement européen est en train de finaliser sa position. Le DMA vient d’être voté et le DSA le sera en janvier. Il incombera alors à  la Présidence française de l’Union européenne (PFUE) de négocier ces textes entre les institutions européennes. Le règlement sur les services numériques est le règlement le plus large. Il se concentre sur les responsabilités des plateformes, depuis les posts incitants à la haine sur les réseaux sociaux jusqu’à la vente de contrefaçon en ligne. Le règlement sur les marchés numériques, ou Digital Market Act se concentre sur les gros acteurs comme les GAFAM, et leurs pratiques anticoncurrentielles. Parce qu’ils sont de gros acteurs, le DMA propose des responsabilités plus importantes à ces plateformes. 

Plateformes numériques et liberté d’expression

Les plateformes numériques sont si omniprésentes qu’elles possèdent désormais un pouvoir de censure, ce qui est extrêmement dangereux pour le débat public. Leurs algorithmes régulent l’accès à l’information et leurs filtres peuvent supprimer automatiquement des contenus jugés sensibles mais pas forcément illégaux. La proposition de la Commission sur le DSA interdit ce contrôle généralisé des contenus, en obligeant les plateformes à retirer les contenus définis comme illégaux par les autorités et non pas de façon proactive via un filtre, ce qui représenterait une grave menace pour la liberté d’expression. Mais la droite du Parlement veut introduire ces filtres automatiques, voire étendre leur pratique. Selon certains élus, les plateformes doivent être invitées à retirer également les contenus illégaux “équivalents”.  C’est notamment dans cette marge d’interprétation laissée aux plateformes que se cache le diable. L’Origine du monde de Courbet est-il un contenu pornographique ou une œuvre d’art ? Seule une analyse humaine saurait le dire. Le DSA pourrait également autoriser la suppression de contenus voire de comptes. On pense par exemple à la suppression du compte Twitter de Donald Trump au moment de l’intrusion de ses militants dans le Capitole, qui, quoi qu’on pense de sa politique, avait suscité un grand débat sur le pouvoir des GAFAM. Les contenus d’opinions doivent pouvoir se diffuser, ce pourquoi Emmanuel Maurel a défendu que les questions de modérations de contenus ne s’appliquent pas aux médias, sauf si ces derniers tombent sous le coup de la loi.

Il est cependant important que les contenus s’apparentant à des crimes dans les pays membres de l’Union européenne (liés à la diffusion d’images de meurtres, de viols, liés à la pédocriminalité) ne puissent être diffusés impunément. Pour Emmanuel Maurel, ce qui est interdit dans la vie réelle doit l’être aussi dans la vie numérique. L’eurodéputé a donc milité pour obtenir la suppression de ce type de contenus dans les 72h après les premiers signalements. 

Enfin, le règlement prévoit un mécanisme de plainte et une obligation de rapport annuel sur toutes les défaillances rencontrées. Mais cela relève davantage de l’auto-évaluation plutôt que de véritables audits externes à valeur contraignante. 

La publicité ciblée, fléau qui promeut un modèle consumériste néfaste

Les plateformes numériques influencent également nos choix de consommation, notamment en récupérant nos données personnelles et en les utilisant pour nous proposer des produits adaptés à nos envies. En juillet 2021, Anne-Sophie Pelletier dénonçait déjà la collecte et l’exploitation d’énormes quantités de données personnelles, au cœur du modèle économique des plateformes, qui nous mènent droit vers un capitalisme de surveillance si nous ne mettons pas en place les garde-fous nécessaires. En tant que rapporteure fictive pour un avis en Commission LIBE, Anne-Sophie Pelletier a donc déposé des amendements afin d’interdire la publicité ciblée qui contribue à influencer le comportement des utilisateurs « Les plateformes systémiques ne doivent pas porter atteinte à l’autonomie, la prise des décisions et le choix des consommateurs. Ce qui est illégal hors ligne doit être illégal en ligne. ». Ce mardi en plénière, la députée insoumise insistait sur le fait que “Des pans entiers de notre intimité sont collectés, jetés en pâture à des entreprises dont le modèle économique repose sur la violation de notre vie privée”.

Emmanuel Maurel a également déposé des amendements en commission JURI, pour interdire la publicité ciblée, mais aussi pour interdire les croisements de données personnelles et empêcher l’utilisation à des fins commerciales des données relatives à l’origine, l’orientation sexuelle ou aux opinions politiques, même en cas de consentement des utilisateurs.

Au-delà de la vie privée, les publicités ciblées promeuvent un modèle consumériste extrêmement nocif pour notre planète, à l’heure où nous avons plus que jamais besoin de sobriété. Pour lutter contre ce fléau, le DSA et le DMA mettent en place une obligation de transparence vis-à-vis des publicités ciblées (qui paie, quel ciblage). Le Parlement européen a demandé son interdiction pour les mineurs mais cela ne suffit pas ! Nous demandons son interdiction y compris pour les majeurs, ou au moins que cette option soit par défaut désactivée pour que le consommateur fasse le choix de l’accepter de son plein gré s’il le souhaite. 

Faire cesser le déménagement permanent du monde, cela passe aussi par stopper les pratiques qui nous incitent à acheter n’importe quoi de l’autre bout du monde ! 

Pour empêcher les monopoles des GAFAM, c’est raté 

Le Digital Market Act voté cette semaine au Parlement européen cible les grosses plateformes et leur impose des règles plus ambitieuses, notamment en matière de transparence des algorithmes. Il exige par exemple plus d’interopérabilité et de portabilité car il n’est pas normal d’acheter de la musique sur Itunes et de ne pas pouvoir l’exporter sur Spotify. 

Un amendement est passé permettant d’élargir les obligations des plateformes dites contrôleuses d’accès ou gatekeepers. À l’origine, le texte n’imposait des obligations et un contrôle que sur les plateformes en elles-mêmes. Grâce à un amendement déposé par Emmanuel Maurel, cela s’élargit à tous les services proposés par les plateformes, comme le service après-vente, les produits financiers, la réparation ou encore l’hébergement de boutiques annexes, comme sur le marketplace d’Amazon où sont présents des vendeurs qui ne sont pas Amazon. 

Les GAFAM se servent de leur position d’oligopole pour favoriser leurs propres services : le DMA interdit donc de croiser des données issues des cœurs d’activité des plateformes avec ses autres services. Autrement dit, si Google est si puissant aujourd’hui, c’est parce que tous ses produits sont forts de toutes les données collectées tous azimuts (Google Maps, Google Docs etc), ne laissant aucune chance à d’autres acteurs pour émerger, en particulier les outils open-source. 

Notre groupe de la Gauche au Parlement européen a défendu ces mesures ambitieuses. La droite du Parlement européen a néanmoins réussi à atténuer la portée de cette législation. Les seuils pour être considéré comme un gros poisson sont bien trop élevés par rapport à la proposition initiale de la Commission. Des acteurs comme AirBnB ou encore TikTok pourraient donc échapper à ces règles. Il en va désormais de la responsabilité de Macron, lors de la présidence française, de défendre une position plus juste pour les consommateurs européens. 

Plus largement, Macron doit s’engager à revoir la politique de concurrence. Si les GAFAM ont autant de pouvoir, c’est grâce à leur monopole. Le droit européen doit pouvoir empêcher des fusions et acquisitions nocives pour le choix des consommateurs. Le DSA et le DMA devraient également s’accompagner  de mesures concrètes pour la relocalisation de l’industrie numérique, y compris des centres de données. Ces deux règlements constituent sans aucun doute des avancées, par rapport au vide juridique qui existait jusque-là. Des améliorations essentielles à ces régulations sont encore possibles si la présidence française veut bien se donner la peine de montrer la voie. Nous restons donc mobilisés sur cette question et attendrons Macron au tournant lors de la Présidence française de l’UE ! 

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